Du zinc doré pour la Maison du comté

Ouverte au public en mai dernier, la maison du comté, située à Poligny dans le Jura, fait la part belle au zinc, en toiture comme en bardage. Le coloris choisi interpelle, référence au fromage qu’elle célèbre. Découverte.

Il est des filières dont on ne soupçonne guère l’existence, et dont on imagine encore moins qu’elles obtiennent leur propre « maison », espace muséographique entièrement dédié. C’est pourtant ce qui a été réalisé à Poligny par les producteurs de lait, les fromagers et les affineurs avec la Maison du comté. Plusieurs années de réflexion et deux ans et demi de travaux ont été nécessaires pour la faire sortir de terre dans cette petite ville du Jura, ancienne cité fortifiée qui cultive une longue tradition gastronomique, et surtout capitale autoproclamée du comté. Cette Maison accueille désormais sur 3 000 m2 les bureaux professionnels du Comité interprofessionnel de gestion du comté (CIGC), de l’Union régionale des fromages d’appellation d’origine comtois, et de trois autres syndicats des appellations d’origine protégées (AOP) fromagères du massif jurassien (bleu de Gex, mont d’Or et morbier). Elle propose au grand public un voyage immersif dans l’univers du célèbre fromage, via une scénographie basée sur les cinq sens.

Un projet… à affiner

Comme le produit qu’il met en valeur, le projet de la Maison du comté a demandé plusieurs années d’affinage ! Initié en janvier 2012, il est le fruit d’un constat global : le manque de place dans l’ancien espace sis dans le centre-ville de Poligny, où les collaborateurs des différentes filières se retrouvaient fort à l’étroit dans leurs bureaux, et où 200 m2 seulement étaient attribués à la muséographie (accueillant en tout et pour tout 13 000 visiteurs par an…). Après différentes études et la validation de la municipalité, tâche a été confiée en 2016 à l’agence d’architecture Amiot-Lombard, de Besançon (25), d’imaginer le futur édifice à construire à l’emplacement d’un ancien stade. La première pierre a été posée en octobre 2018.

Quatre bâtiments bien intégrés dans leur environnement

La Maison du comté est en fait composée de plusieurs unités reliées entre elles. Quatre édifices forment l’ensemble : deux bâtiments pour l’accueil du public, un bâtiment de bureaux sur trois niveaux, et un espace destiné au stockage, à l’archivage et à diverses activités logistiques. Pour une évidente question d’uniformité, ils obéissent tous à la même logique architecturale : des volumes de taille relativement modeste en structure bois, recouverts de zinc doré aussi bien en bardage que sur les toitures à deux pans. Les quatre édifices sont reliés entre eux par des espaces de connexion en maçonnerie recouverts de toitures-terrasses végétalisées. L’esthétique a évidemment été réfléchie de façon à bien s’intégrer dans l’environnement vernaculaire de Poligny.

Le bois local valorisé

Qu’elle soit apparente ou non, la structure bois est omniprésente dans tous les bâtiments. Environ 525 m3 de différentes essences ont été utilisés, notamment 345 m3 d’épicéa local et de mélèze pour la charpente et l’ossature bois, et 120 m3 d’épicéa local en voliges comme support pour le zinc. Proche de l’œuvre d’art, la charpente du vaste hall d’accueil est volontairement laissée visible aux yeux des visiteurs. Ses fermes sont constituées « de nombreux poinçons ou buttons verticaux et de cinq entraits horizontaux, tous dédoublés, détaille la présentation de l’agence d’architecture. Les arbalétriers […] sont ”retroussés” dans l’épaisseur du complexe de couverture, au-dessus des pannes (par opposition à en dessous comme c’est le cas habituellement). » La charpente supporte des caissons bois formant la toiture, tandis que les lattis sous toiture servent à la fois de structure portant l’isolant thermique et de correcteur acoustique grâce à un pare-vapeur noir mis en œuvre entre les lattes. Quatre sociétés locales ont œuvré sur le chantier: le groupement d’entreprises ALD de Port-Lesney, et les trois co-traitants Mariller d’Orgelet, Gauthier d’Augisey, et Henriet de la ville même de Poligny.

Habillage de zinc pigmenté

Enfin, pour parfaire l’ensemble, un habillage en zinc pigmenté recouvre les murs et la toiture. C’est la solution Rainbow or du fabricant espagnol elZinc qui a été retenue pour donner cet aspect doré à la Maison du comté. 38 tonnes de zinc ont été posées traditionnellement – à joint debout sur voligeage – par les entreprises jurassiennes de couverture Nouveau & Myotte, basée à Salins-les-Bains, et Puget, basée à Dôle. En outre, « les chéneaux et les descentes d’eau pluviale sont intégrés au volume des bâtiments, tout comme les ouvertures de toitures, les exutoires de désenfumage, une porte de service, les sorties et des prises d’air de ventilation ». Le but étant, évidemment, d’éviter au maximum de rompre l’unité de l’enveloppe. Sortes d’épines dorsales, des éléments de zinc sur tasseaux d’épicéa viennent scander la longueur des édifices, rythmant ainsi d’autant mieux la trame constructive en alignant les différentes ouvertures et menuiseries. Après plus de deux années de travaux ralentis par la crise sanitaire, la trentaine de salariés a emménagé dans son nouvel espace de travail en début d’année, et le centre d’interprétation a ouvert au grand public le 19 mai dernier. Un écrin doré pour un fromage AOP qui, pour l’anecdote, demeure particulièrement riche en protéines, vitamines, calcium, phosphore, cuivre… et zinc ! Prédestination ?

Brice-Alexandre Roboam

 

Le vaste hall d’entrée permet aux visiteurs d’admirer les fermes de charpente.

 

 

 

 

 

Coupe transversale de l’espace d’exposition.

 

 

 

 

 

Les bâtiments du site sont recouverts de 38 tonnes de zinc.

Articles Similaires

Partager l'article

spot_img

Derniers articles